5e dimanche dans l’année C – 6 février 2022

                                            Is 6, 1-2a. 3-8; 1Co 15, 1-11; Lc 5, 1-11

L’Appel du Seigneur : la Vocation d’Isaïe, de Paul, de Pierre, Jacques et Jean.

« Ce que je suis, je le suis par la grâce de Dieu, et la grâce dont il m’a comblé n’a pas été stérile » 1Co 15.

Chaque homme comme Isaïe, Paul, Pierre, Jean et Jacques, est appelé à être ce qu’il est profondément ; à trouver un sens à son existence. Tout homme est appelé à faire quelque chose dans sa vie.

En effet, les ados d’aujourd’hui comme ceux d’hier se demandent tous un jour ou l’autre ce qu’ils feront dans la vie. C’est une question qu’ils porteront pendant de nombreuses années pour certains et certaines. Pour d’autres la voie est toute tracée. Leur choix ne les préoccupe pas. Ils suivront les traces d’un père ou d’une mère. Ils se lanceront dans un domaine qui les passionne déjà. Pour plusieurs, le chemin sera plus long. Il se fera à travers des hauts et des bas. Des essais et des échecs. C’est la vie dira-t-on… Nous sommes ici sur le terrain du choix d’un travail ou d’une profession.

Il en va ainsi pour la personne croyante qui désire découvrir son chemin, sa vocation car, comme le dit le pape François : « Ce qui importe, c’est que chaque croyant discerne son propre chemin et mette en lumière le meilleur de lui-même, ce que le Seigneur a déposé de vraiment personnel en lui (cf. 1 Co 12, 7) et qu’il ne s’épuise pas en cherchant à imiter quelque chose qui n’a pas été pensé pour lui. » (Exhortation Gaudete et Exsultate sur la sainteté n. 11)

Nous avons dans les trois textes d’aujourd’hui trois récits de vocations qui ont été vécues par des personnes comme nous qui ont été l’objet d’un choix particulier de Dieu. À cause de circonstances particulières, le chemin déjà poursuivi a pris pour elles une direction nouvelle et inattendue. C’est ce qui est arrivé à Isaïe, à Paul, à Pierre et aux autres disciples du Christ.

La vocation d’Isaïe, Paul, Pierre passe par une rencontre.

Cette rencontre peut être extraordinaire comme la théophanie que vit Isaïe, perturbante comme celle de Paul sur le chemin de Damas, ou plus simple comme celle de Pierre qui rencontre un homme alors qu’il pêche sur le lac.

  1. La vocation du prophète Isaïe.

La vocation du prophète Isaïe ! On sait qu’il a vécu au temps du roi Ozias vers 760 avant Jésus-Christ. Il était un juif pieux, dévoué pour les autres et sa vie se déroulait paisiblement. C’est alors qu’est survenu ce moment de rencontre avec Dieu où il entend un appel.

Le cadre de cet appel le situe au service de son peuple que Dieu veut stimuler pour qu’il vive mieux l’Alliance conclue avec Abraham. Il sera comme le tisonnier qui ranime la flamme. Il devra parler haut et fort au nom de Dieu, une mission qu’il n’avait jamais entrevue, une mission pour laquelle il se sent démuni.

Et pourtant le Seigneur l’a choisi. Comme plusieurs autres avant lui, notamment le prophète Samuel (cf. Samuel 3, 9-10) sa réponse sera « Me voici : envoie-moi ! »

Sa vie aura basculé pour toujours. Il sera un des quatre grands prophètes de l’Ancien Testament qui sont, en plus de lui, Jérémie, Ézéchiel et Daniel.

II. Le cas de Saint Paul.

La deuxième vocation particulière qui nous est présentée aujourd’hui est celle de saint Paul comme prédicateur de l’Évangile, un ministère qu’il a rempli pendant de nombreuses années autour de la Méditerranée avant d’être amené à Rome comme prisonnier et d’y être mis à mort.

Son histoire que nous connaissons commence avec une implication comme jeune juif pharisien consacré à l’étude de la Loi et des Écritures Saintes. Il semble y avoir pris beaucoup de plaisir. Et c’est pour défendre cette Loi qu’il devient persécuteur des juifs convertis au message de Jésus, les chrétiens, qui apportent le message d’une Loi Nouvelle reçue d’un certain Jésus de Nazareth. Puis c’est la rencontre de ce Jésus sur le chemin de Damas. Il en sera transformé pour le restant de sa vie. Il deviendra l’apôtre des païens et il passera son temps désormais à annoncer la Bonne Nouvelle reçue en Jésus, son Évangile qui devient sa seule raison de vivre cf. I Corinthiens 9, 16, Philippiens 3, 3-8.

Il sera le plus grand des évangélisateurs, des missionnaires de la religion chrétienne qui nous inspire encore aujourd’hui par ses lettres que nous lisons à chaque dimanche. Humblement mais fièrement, il revendique le nom d’Apôtre au même titre que les Douze choisis par Jésus. La deuxième lecture que nous venons d’entendre en témoigne : « Car moi, je suis le plus petit des Apôtres, je ne suis pas digne d’être appelé Apôtre, puisque j’ai persécuté l’Église de Dieu. Mais ce que je suis, je le suis par la grâce de Dieu, et sa grâce, venant en moi, n’a pas été stérile. Je me suis donné de la peine plus que tous les autres ; à vrai dire, ce n’est pas moi, c’est la grâce de Dieu avec moi ».

III. Les apôtres Pierre, Jacques et Jean.

L’évangile nous raconte un appel particulier pour les trois apôtres dont il est question dans ce récit de la pêche miraculeuse que nous venons d’entendre. Ce sont Pierre qui s’appelait Simon avant que Jésus le nomme Pierre pour signifier qu’il est le roc sur lequel les autres pourront s’appuyer et les deux frères, Jacques et Jean, remplis d’énergie dont le surnom était « Boanergès » (Marc 3, 17) qui veut dire « fils du tonnerre ».

Ces trois pêcheurs se connaissent depuis longtemps. Ils œuvrent ensemble et se donnent la main pour leur métier. Ils ont déjà rencontré Jésus auparavant en fréquentant Jean-Baptiste. Ils ont décidé de suivre Jésus tout en continuant leur métier. Ce ne sont donc pas des étrangers pour Jésus. Ils sont déjà des gens qui ont choisi de le suivre. Ils ont une totale confiance en lui et sur sa parole ils relancent leurs filets : « Maître, dit Pierre, nous avons peiné toute la nuit sans rien prendre ; mais, sur ta parole, je vais jeter les filets. »

Tout surpris, Ils ramènent plein de poissons. Pour Jésus cette pêche miraculeuse est le signe de ce qu’il attend d’eux. Il dit alors à Pierre « Sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras ». Jésus renvoie ainsi Pierre, Jacques et Jean à l’image de leur métier, mais il en change la teneur. Ils parcourront la mer du monde pour y rencontrer les gens de toutes nations, de toutes cultures et de tous pays et leur annoncer la Bonne Nouvelle.

Ce qui se passe dans cet épisode de la pêche miraculeuse est un virage majeur que prend leur vie qui ne sera plus jamais la même : leur vocation désormais sera celle d’être apôtres, protagonistes et diffuseurs du message de Jésus. « Et, laissant tout, ils le suivirent ».

Ce qu’ils ont fait avec cœur puisqu’après la Pentecôte ils sont partis chacun de son côté et ils ont jeté les bases de l’Église que nous connaissons aujourd’hui. Ils sont vénérés par tous les chrétiens comme les piliers de l’Église. C’est leur témoignage de la Résurrection de Jésus qu’ils avaient suivi sur les routes de Galilée qui allumera la foi de leurs compatriotes puis des générations subséquentes.                L’Évangile grâce à eux et à leurs successeurs se répandra dans le monde entier selon le souhait de leur Maître « « Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création ». (Marc 16, 15)

Frères et sœurs, ces trois récits présentent des vocations spéciales, qui peuvent nous inspirer nous aussi dans la découverte de notre vocation personnelle. Comme Isaïe, Paul, Pierre, Jacques et Jean nous pouvons être ou devenir des personnes qui répondent avec empressement à l’appel de Dieu. Ces appels ne sont peut-être pas aussi éclatants que ceux d’Isaïe, de Paul ou de Pierre, Jacques et Jean, mais ils sont bien là. Si on prend le temps d’écouter la voix de l’Esprit en nous, nous découvrirons comment vivre aujourd’hui dans l’amour de Dieu avec confiance et avec conviction. Point n’est besoin de quitter son emploi ou de laisser son foyer. Il suffit de vivre l’instant présent sous le regard de Dieu. Car le Seigneur vient nous rejoindre dans le train-train quotidien de notre vie. Et plus souvent c’est dans le moment difficile de notre vie comme celui des pêcheurs expérimentés qui ont peiné toute la nuit sans rien prendre que le Seigneur choisit pour monter dans la barque de nos vies pour nous apprendre que sans lui nous ne pouvons rien. C’est dans des situations complexes de nos vies comme celle de Paul sur le chemin de Damas que le Seigneur choisit pour nous transformer.

Quelle est cette situation de ma vie où j’expérimente le poids de la fatigue, peut-être de l’échec ?     C’est là que le Seigneur nous rejoint. Il vient faire de nos fatigues et de nos situations complexe l’occasion d’une rencontre intime avec lui pour nous donner une mission, pour nous envoyer vers les autres. Et cela ne veut pas dire qu’avec lui les difficultés, les souffrances disparaîtront, mais avec lui nous donnerons à toutes ces situations un sens.

Par ailleurs, bien souvent nous craignons de répondre directement à cet appel de Dieu. Peut-être parce que nous mettons en avant nos limites.

  1. Surmonter sa peur et ses limites.

Sommes-nous toujours prêts pour répondre à l’appel de Dieu ?

Tous les récits bibliques nous disent qu’en fait personne n’a répondu sans hésitation ou sans se poser des questions à l’appel de Dieu.

« Malheur à moi, je suis perdu, car je suis un homme aux lèvres impures » (Isaïe).

« Je ne suis pas digne d’être appelé Apôtre, car j’ai persécuté l’église de Dieu » (Paul).

« Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un pécheur » (Pierre).

En effet, les raisons pour refuser l’appel de Dieu sont multiples et variées : trop jeune, trop vieux, trop occupé, pas assez digne etc. Et la raison profonde est que cela nous renvoie à nos propres limites et à notre propre faiblesse. Or, l’appel de Dieu est toujours un appel à dépasser les limites que l’on s’était posées.

Dans sa prière pour les Vocations, le Cardinal Jean-Baptiste Pham Minh Mân, alors archevêque de Saigon disait : « Dieu avait besoin d’un père pour Son peuple, Il choisit un vieillard, alors Abraham se leva … Il avait besoin d’un porte-parole, Il choisit un timide qui bégayait, alors, Moïse se leva … Il avait besoin d’un chef pour conduire Son peuple, il choisit le plus petit, le plus faible, alors, David se leva … Il avait besoin d’un roc pour poser l’édifice, Il choisit un renégat, alors, Pierre se leva … Il avait besoin d’un visage pour dire aux hommes Son amour, il choisit une prostituée, ce fut Marie de Magdala … Il avait besoin d’un témoin pour crier Son message, Il choisit un persécuteur, ce fut Paul de Tarse … Il avait besoin de quelqu’un pour que Son peuple se rassemble, et qu’il aille vers les autres, alors Il t’a choisi(e) ! Et même si tu trembles, pourrais-tu ne pas te lever ?»

Amen

Abbé Hugues MBATIZOMA