4e dimanche de Carême B – 14 mars 2021

Élevé,

Est le thème qu’Entraide&Fraternité nous propose à méditer en ce 4ème dimanche de carême B.

La croix qui en est l’expression nous y invite. Et comme nous le dit l’Entraide & Fraternité dans son commentaire sur le thème d’Elevé,  je cite : »la croix est une élévation…Et ce qui transforme l’humiliation de la croix en élévation, ce qui fait d’un instrument de la mort une source de vie, c’est l’amour immense dont Dieu riche en miséricorde aime le monde. En levant les yeux vers Celui qui est ainsi élevé, ce n’est pas seulement d’une maladie que nous sommes guéris, c’est de la mort. Et pas d’abord de la mort corporelle à laquelle nul humain ne peut échapper, mais de la seconde mort qui nous perd tout entier, de l’anéantissement de tout ce qui nous fait vivants. Avec le crucifié élevé, ressuscité, nous sommes aussi ressuscités.  »

La passage de l’épître aux Ephésiens que nous avons lu ou nous lirons le doigt y est mis sur trois points essentiels de la Foi chrétienne. 1.C’est par la grâce que nous sommes sauvés. 2. Vous êtes sauvés parce que vous avez la foi. 3.La foi est le don de Dieu.

Un des refrains de l’enseignement de St Paul est celui par lequel il redit que l’homme est sauvé par grâce. Ce mot, dans nos esprits, est parfois devenu obscur. Nous pensons facilement qu’il s’agit d’un terme technique de la théologie. Tout à l’inverse, il s’agit d’un mot simple dont le sens est celui que nous employons tous les jours lorsque nous disons que quelque chose est « gratuit « .La grâce c’est quelque chose de gratuit, que nous n’avons pas mérité, que nous n’avons pas acheté, qui nous est donné. Une bonne traduction du mot grâce est le mot « cadeau « .

Dire que tout est grâce, c’est dire que la vie nous a été donnée comme un cadeau ;c’est dire que tout ce que comporte notre vie, est un cadeau.

Aujourd’hui, St Paul précise que si nous sommes sauvés un jour, c’est à dire si notre mort inévitable nous ouvre à la vie éternelle en Dieu, ce sera encore par cadeau.

Pour les hommes religieux, l’annonce que tout est grâce n’est pas évident. Il y a en effet une longue habitude des hommes, à travers toutes les religions, qui voudrait l’inverse. Spontanément, en effet, nous imaginons que nos relations à Dieu  sont calquées sur les relations dont nous avons pris l’habitude entre nous :rien pour rien. Si nous demandons quelque chose à Dieu, il faut lui proposer autre chose en échange. Nous tombons alors sur le faux sens du mot sacrifice :les dons de Dieu sont à acheter. Si nous voulons obtenir quelque chose de Dieu, il faut proposer à Dieu autre chose, à quoi nous tenons. Nous voici, en matière de vie religieuse, dans une relation mercantile avec Dieu.

Certe cette conviction ne manque pas de générosité, voire d’héroïsme. Mais toute la Bible nous apprend que si nous pensons cela,nous sommes parfaitement à côté de la plaque. Qu’est donc l’homme pour proposer un marché à Dieu ?Avec Dieu  tout est cadeau, tout est grâce.

Cela voudrait dire alors qu’aux yeux de Dieu  l’homme n’est capable de rien ? Bien sûr que non ! La première lecture du livre des chroniques, (36,14-16.19-23) nous indique le contraire puisque nous y voyons le drame de Dieu contraint de retirer à son peuple les dons qu’il lui a faits, contraint, plus exactement, à ne plus pouvoir continuer à lui prodiguer ses dons. La terre qu’Il avait donnée à Israël, Dieu se voit obligé de la lui retirer et de permettre l’exil du peuple loin de la terre promise. Nous parlons alors d’une punition. Peut-être ! mais pas au sens arbitraire de nos punitions humaines. Que s’est il donc passé ?

Tout simplement, pour que les dons de Dieu puissent couler de lui jusqu’à nous, il est nécessaire que nous leur ouvrions notre cœur. Les dons de Dieu ont  nécessairement besoin de trouver en nous l’accueil, le désir. Dieu a nécessairement besoin de notre confiance. Il ne peut pas combler un cœur saturé ou fermé. Et ce n’est pas sa faute à lui. C’est bien la faute du cœur qui se ferme si Dieu ne peut plus le combler.

Cette ouverture du cœur, cet accueil nécessaire à Dieu, cela s’appelle la foi. La foi consiste précisément en ceci :ne plus faire confiance à nos seules forces,mais faire enfin confiance à la parole, à la promesse de Dieu. La foi c’est prendre acte de notre nullité puisque tout ce que nous sommes, tout ce que nous avons, c’est parce que Dieu a bien voulu nous le donner. La foi consiste donc à maintenir notre désir tout entier branché sur Dieu qui sait, mieux que nous, ce dont nous avons besoin.

On peut alors comprendre combien le péché et la foi sont antinomiques. Le péché consiste à croire en la seule force de l’homme, au seul jugement de l’homme. Rappelons-nous. A propos de l’arbre qui était au milieu de l’Eden,Dieu avait dit: » tu n’en mangeras pas « .Adam et Eve pensaient, à l’inverse : le fruit est beau et bon à manger. Ils préférerent écouter leur jugement propre plutôt que d’écouter la parole de Dieu. Tout à l’inverse Abraham,bien installé et riche  pensait certainement : pourvu que cela dure. Dieu vient lui dire : »quitte ton pays « il préfèra écouter la parole de Dieu plutôt que d’obéir à son jugement propre. Il devint le premier et le père des croyants. Il fit exactement la seule chose que l’homme peut faire pour permettre à Dieu de l’inonder de sa vie et de ses dons :Croire en Dieu.

Le message du carême est un message d’espérance :notre vie n’est pas un voyage sans but et sans espoir. Notre vie n’est pas une passion inutile, comme disait Jean Paul Sartre. Autour du pain et de la Parole de Dieu, nous nous rassemblons chaque dimanche pour célébrer notre espérance chrétienne : »Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils unique afin que celui qui croît en lui ne meure pas mais qu’il ait la vie éternelle « .Amen !

Abbé Jeannot-Basile