31e dimanche dans l’année B – 31 octobre 2021

Chers frères et sœurs,

On dit parfois que ce qui distingue l’ancien et le Nouveau Testament, c’est la révélation de l’amour. L’Ancien Testament offrirait aux hommes un Dieu sévère, vengeur, guerrier et qu’il faudrait redouter, alors que le Nouveau Testament présenterait enfin un Dieu qui sait aimer et se faire aimer. La première lecture de ce jour nous montre clairement que ce partage est complètement faux.

Dès l’Ancien Testament, Dieu se révèle comme un Dieu qui aime. Il faut se rappeler l’Exode. Tout au long des quarante années de désert Dieu s’occupe de son peuple comme une mère s’occupe de son nouveau-né, le nourrissant et le désaltérant jour après jour. Osée et Jérémie, n’hésitent pas à comparer les relations de Dieu avec les hommes à l’amour fou d’un fiancé pour sa fiancée. C’est bien l’Ancien Testament qui nous offre le magnifique poème qu’est le Cantique des Cantiques.

Aujourd’hui, nous apprenons, en lisant le livre du Deutéronome, que la grande loi donnée par Dieu à son peuple, c’est la suivante : »tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toutes tes forces.  »

La loi d’amour est déjà inscrite dans les pages les plus antique de la Bible.

Chers frères et sœurs,

Lorsque Jésus paraît parmi les hommes, son message n’est pas aberrant pour un bon juif qui l’écoute avec sincérité. C’est le sens de la scène que l’on rapporte ici. Sans doute que le scribe qui vient interroger Jésus désire connaître la spécificité de l’enseignement de ce nouveau prophète. Or la réponse qu’il reçoit est une citation du Deutéronome. Et cette citation annonce l’amour. Le scribe ne peut qu’approuver. Rien de nouveau dans l’enseignement de Jésus. Il est parfaitement orthodoxe.

Et pourtant Jésus étonne les plus fins connaisseurs de la Bible. Il les scandalise même puisque leur étonnement se changera bientôt en haine et ils le crucifieront. Pourquoi ?

Parce que Jésus remettra les choses en place. Jésus dira : qu’il n’y a qu’un seul commandement, aimer. Pourtant, c’est vrai, il dira aussi qu’il ne faut enlever aucun iota à la loi. Mais, pour lui, la distinction est radicale entre les préceptes de la loi et le commandement de l’Amour. La loi, avec ses innombrables préceptes, n’a qu’un but, c’est de placer le fidèle de la loi devant l’urgence de l’amour. Les préceptes de la loi ne sont bons que s’ils sont les serviteurs de l’unique commandement, celui de l’amour. La loi est faite pour l’homme, pour lui montrer son manque d’amour et le conduire enfin à aimer.

Or la religion que Jésus rencontre autour de lui ne respecte plus cette hiérarchie. Elle fait des préceptes un absolu. Au point que, par exemple, si l’on rencontre un malheureux, on n’a pas le droit de le toucher sous peine d’impureté. Dans la parabole du bon samaritaine, Rappelons-nous, le prêtre et le lévite ont vu le pauvre homme blessé et abandonné sur le bord du chemin. Ils ont changé de côté et sont passés.

Jésus restaure les droits de l’amour. Au point qu’il pourra même annoncer une chose incroyable. Si un homme n’a jamais connu Dieu mais s’il aime son prochain et le sert, cet homme- là est aimé de Dieu et sauvé. C’est au larron, ce réprouvé, condamné par tout ce que son temps peut contenir d’hommes religieux, que Jésus annonce : « aujourd’hui même, tu seras avec moi dans le paradis ».

C’est de la prostituée, alors que tout le monde la méprise, qu’il dira : « il lui sera beaucoup pardonné parce qu’elle a beaucoup aimé « .

Chers frères et sœurs,

La nouveauté évangélique est ici.

Non pas dans la révélation de l’amour mais dans la restauration de l’amour comme seule et unique règle de vie des croyants. Croire, c’est vouloir être habité par Dieu. C’est vouloir que Dieu gouverne nos vies puisqu’en tout nous affirmons faire confiance en sa parole et exaucer ses demandes. Nous prétendons écouter Dieu, obéir à Dieu. Or Dieu se révèle, en Jésus, comme pétri d’amour, constitué par l’amour. Le Père et le Fils en relation d’amour telle que cet amour même constitue la Troisième Personne de la Sainte Trinité, le Saint-Esprit.

Chers frères et sœurs,

Quoi d’étonnant à ce que Jésus ait poussé les exigences de l’amour jusqu’à l’extrême ? L’extrême pour nous, c’est bien d’aimer ceux qui ne nous aiment pas et jusqu’à nos ennemis. Or l’amour des ennemis n’est rien d’autre que l’amour de Dieu pour les hommes. Comment Dieu aurait-il pu aimer les hommes s’il n’avait osé aller jusqu’à aimer ceux qui se voulaient ses ennemis ?

Abbé Jeannot-Basile.